Si, pour beaucoup, le nom de Baldur’s Gate est encore aujourd’hui synonyme d’âge d’or du C-RPG, rien n’a pu sauver la licence de son naufrage en 2003, en même temps que celui de son légendaire éditeur: Black Isle Studios.Renaissant de ses cendres tel le phénix en 2012, une fois la stupeur passée, nous avons rapidement compris qu’il n’était plus que l’ombre de lui-même. La grande majorité des anciens développeurs est partie fonder Obsidian Entertainment. Depuis, la nouvelle équipe se contente visiblement de quelques communications erratiques et de sorties de “ remake HD ” des succès d’antan.Et aujourd’hui, c’est au tour de Baldur’s Gate: Dark Alliance 2 d’en faire les frais.
Portage, Remaster HD ou Remake?
Dans un pur souci de transparence, Black Isle Studios a choisi la voie de la confusion plutôt que du mensonge frontal et éhonté. Dans le trailer, il nous est clairement spécifié que nous sommes face à un “ Remaster ”. Dans certains communiqués officiels ainsi que sur la page du titre sur le Microsoft Store, cette mention disparaît au profit d’un “ affichage 4K Ultra HD ”.Dans les faits, et à l’instar du premier opus, nous sommes bien ici sur un portage ayant subi un léger coup de polish pour l’adapter aux écrans et aux consoles modernes. Si in-game les graphismes semblent avoir été lissés pour un plus grand confort, le titre ne propose rien de plus qu’un upscale identique à celui déjà offert par Microsoft dans d’autres jeux de la même époque. Certes, c’est jouable… mais ne vous attendez à rien d’autre qu’un confort visuel légèrement supérieur à la version de base, pourtant sortie il y a 18 ans déjà.
- Les cinématiques sont en basse résolution
Pis encore, le travail en question ne concerne que les phases de gameplay actives. Ni les cinématiques, ni le son n’ont été retravaillés ou optimisés. Nous avons donc été surpris de nous retrouver face à des vidéos en basse résolution, à un mixage sonore tout simplement inaudible, ou encore à des lags assez gênants lors d’une sortie de pause ou d’une reprise après mise en veille de la machine. Et bien entendu, la 4K Ultra HD promise est tout simplement inexistante et, au mieux, nous avons pu bénéficier d’un signal en 1080p durant nos phases de test.
Il est donc clair que nous sommes devant un portage fainéant, ne proposant que le strict minimum pour nous amener dans cette aventure qui, pourtant, avait tant fait parler d’elle à l’époque.
C’est dans les vieux pots…
Manette en main, la désillusion ne fait que croître. Le jeu est exactement le même qu’en 2004, sans que la moindre petite amélioration ne vienne faciliter la prise en main ni le plaisir.
Nous sommes donc face à un hack’n’slash / A-RPG dans le monde des Royaumes Oubliés. Tout comme dans les précédents opus de la licence éponyme, nous nous retrouvons dans les alentours de la Porte de Baldur, sur la Côte des Épées, prêts à vivre moult aventures trépidantes dans cette suite directe des événements du précédent Baldur’s Gate: Dark Alliance.A contrario d’autres hack’n’slash plus classiques, ce Dark Alliance 2 nous propose de vivre cette expérience avec un gameplay atypique. Entendez par là que si le jeu ressemble à un hack’n’slash, s’il en a le goût et l’odeur, on trouve çà et là des éléments bien plus propres aux A-RPG. Ainsi le leveling est capé au niveau 40, nous devons gérer une feuille de personnage relativement proche de ce qui est trouvable dans Donjons & Dragons (avec des compétences actives et passives, la gestion du poids, des types d’armures, etc.), et les combats y sont également bien moins dynamiques.
- Je crois que cet homme veut nous parler.
Le moindre petit ennemi peut prendre 4 ou 5 coups à tuer. Il peut également se protéger, attaquer à distance, fuir… Bref, les affrontements sont à aborder avec méfiance, d’autant que l’Intelligence Artificielle n’est pas en retrait (du moins pour l’époque). Il nous est arrivé à plusieurs reprises de devoir pourchasser un adversaire à la santé basse, pour mieux le voir rejoindre ses compagnons.N’espérez cependant pas ici d’un monde ouvert, mais une succession de niveaux plus ou moins linéaires dans lesquels il est difficile de se perdre. Le chemin principal est tout tracé, sans la moindre originalité de level design (la suite du scénario, c’est tout droit). L’exploration demeure néanmoins relativement attractive, puisque nous pouvons y dénicher coffres et ennemis.L’aventure principale est assez longue (comptez entre dix et quinze heures), d’autant que le titre de Black Isle nous promet une certaine rejouabilité. Trop relative malheureusement, elle consistera simplement à refaire les mêmes niveaux dans une difficulté plus importante ou en optant pour l’un des 7 personnages disponibles (dont deux cachés qui parleront forcément aux puristes: Artémis et Drizzt).
- La fine équipe au complet
Il est dommage cependant que la courbe de difficulté soit si hasardeuse. Votre première aventure peut en effet se révéler particulièrement ardue, surtout en jouant un personnage au corps-à-corps. Mais les suivantes, elles, sont d’une étonnante facilité. Finir le jeu en difficulté maximale, une fois son personnage au niveau 40, avec un équipement de qualité, devient une promenade de santé (réduisant drastiquement la durée de vie d’un run aux alentours de 4 à 5 heures).Le véritable attrait du jeu provient en revanche de son mode deux joueurs en local (couch-coop). Nous pouvons ainsi parcourir l’intégralité de l’aventure avec un ami qui, d’ailleurs, peut nous rejoindre ou quitter à l’envi. Encore aujourd’hui, ce genre de jeux est malheureusement trop rare et pouvoir bénéficier de cette fonctionnalité n’est clairement pas du luxe.Bien entendu, nous nous devons de mettre en avant une écriture quelque peu limitée dans laquelle la majorité des personnages féminins ont visiblement bien trop chaud. Imputable à l’âge du titre, cette vision du personnage-fonction est malheureusement bien trop présente pour la passer sous silence.
18 ans et quelques rides
Une fois cette base posée, demeure la question indispensable: que reste-t-il de cette expérience en 2022? Eh bien malheureusement, assez peu de points positifs. Baldur’s Gate: Dark Alliance 2 accuse son grand âge et, manette en main, ressemble plus à un grabataire incontinent qu’à un véritable jeu d’action survolté comme dans sa prime jeunesse.On aurait aimé que de gros efforts soient faits pour véritablement adapter le jeu aux standards de notre époque. En évitant par exemple les multiples allers-retours dans le menu pause, que ce soit pour afficher ou masquer la carte; ou encore pour se téléporter en ville (via des “ potions de rappel ” pourtant bien présentes dans notre inventaire).De même, un verrouillage des ennemis n’aurait clairement pas été de trop. La maniabilité est désastreuse, notre personnage se déplace comme un camion, la visée est calamiteuse, il est impossible de toucher un groupe d’ennemis sans des compétences spécifiques de zone… Autant de problèmes qui n’existent plus dans ses concurrents modernes et font de ce titre une véritable capsule temporelle.
- Certaines quêtes sont très longues
Enfin, on regrettera surtout l’absence totale d’indications sur le HUD ou d’un tutoriel. Rien n’est affiché à l’écran pour nous indiquer les fonctionnalités des divers boutons, le nombre de potions restantes, etc. Il est donc commun de se retrouver à court de soins, sans rien pouvoir faire sinon attendre la mort et recharger une partie. Pis encore, on découvre par hasard, ou en explorant le menu «contrôles», que la touche bas de la croix directionnelle permet d’afficher la liste des compétences et d’en changer. Un plus non négligeable, mais contre-intuitif, qui aurait bien mérité une petite explication.Nous sommes littéralement sur un jeu qui n’a pas sa place sur cette génération de consoles. Surtout avec la concurrence et les améliorations apportées au genre par des ténors tels que Diablo 3 ou Torchlight. Surtout au prix demandé.Car là est sans doute l’information qui reste la plus difficile à comprendre et à digérer: malgré le peu de travail effectué sur le jeu, il est tout de même au prix affiché de 30 €.Le comble revient aux bugs, toujours présents depuis la version Xbox première du nom… Et d’autres qui viennent s’ajouter, nous empêchant littéralement de poursuivre notre aventure (Interplay ayant indiqué sur son compte Twitter que ses équipes travaillaient actuellement sur ces derniers).Par “ chance ”, les développeurs ont eu la présence d’esprit de laisser les cheat codes de l’époque. Libre à nous, une fois ces points de l’aventure atteints, de tout simplement passer au niveau suivant.
- La fameuse 4K Ultra HD…
Baldur’s Gate: Dark Alliance 2 reste avant tout un jeu qui a marqué une génération et, malgré ses nombreux défauts bien plus visibles aujourd’hui, a su nous procurer quelques heures vraiment plaisantes. Une fois ce constat posé et ces griefs passés, nous pouvons nous étonner du soin tout particulier apporté au titre à l’époque. Le nombre d’environnements différents est colossal, de même que les ennemis en provenance directe de l’univers du jeu de rôle papier Donjons et Dragons sont très diversifiés. Le respect de la licence est là, bien présent, et plaira incontestablement aux amateurs autant qu’aux nostalgiques.
Testé sur Xbox One X.